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ERIF inaugure la série #blackvoicesmatter avec le guest post écrit par Nicky Lars, rappeur et beatmaker Noir français, auteur de l’album Musica Negra. Dans ce texte réflexif, poétique et engagé, Nicky Lars rend compte de la vague d’émotions et de pensées qui l’assaillent en ce moment exceptionnel marqué par la pandémie et le renouveau des mobilisations pour les vies noires. Oscillant entre frustrations, incertitudes et gratitude, son texte met en lumière la lutte de longue haleine et acharnée des militant.e.s noir.e.s en France, avec un spécial shout out aux Afrofeministes. Suivez l’actualité musicale de Nicky sur son bandcamp, twitter, et instagram.
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Combien d’entre nous ont vu leur écosystème bouleversé par leur réveil militant? Ont tiré un trait sur une carrière ou senti celle-ci en pâtir?
Combien d’entre nous furent moqués par des visages hilares agrémentés d’ironiques points levés? Combien d’ « ami-e-s » (sic) ont fui avec perte (hum pas vraiment) et fracas, ceci appelant un nécessaire « Bon débarras! », symbole de la fin de liens vendus comme solides par un vécu commun – un vécu commun que l’on regarde à présent comme le pire des charlatans?
Combien de commentaires de frères noirs admiratifs de la mobilisation de leurs sœurs viendront enfin perturber les discussions de vestiaire ?
Cette éruption de carrés noirs, ce prénom, George, prononcé à l’américaine, cette levée de hashtags sur les fils des ex-moqueurs-queuses, des ex-ami-e-s, de ces collègues n’ayant pas suivi le mouv’, censé être collectif, dans le bureau de la RH afin de dénoncer le racisme du manager…
Ces célébrités aussi. Parmi elles beaucoup de blanc-he-s. Au passé trouble?
Même pas! Clair comme de l’eau de roche!
Que nous savons problématiques comme jamais, se rachetant une conscience, gagnant des points, se ré-inventant à l’aube du «monde d’après» la covid. Et ce, même auprès des nôtres.
Alors que toute l’année Afro-fem’ est utilisé comme un gros mot,
un prétexte à harcèlement, à vomir une mysoginoirie crasse faisant gagner des followers toujours ravis de déglutir le pire pour le recracher, multiplier, renforcer…
Le four à cookies distribués à des flics à genou tourne à plein régime alors que des femmes noires et autres intellectuel-le-s, militant-e-s de longue haleine connaissent la famine. Nul besoin de préciser, ces dernièr.e.s ne se battent pas pour les éloges.
Mais n’empêche.
Plus qu’amer, je n’ai pas vraiment su comment gérer. Bien plus impacté que je ne l’aurai pensé par la pandémie, les décès de gens plus ou moins proches, le dé-confinement et l’urgence de prendre soins des miens.
Très vite, les noms de victimes Françaises (Adama Traoré, Lamine Dieng…) ont commencé à pop-up.
Puis près de 40 000 corps se sont déplacés devant le TGI du 17ème. J’y ai vu le travail acharné de tout-e-s ces militant-es de l’ombre distillant depuis des années, quitte à faire du goutte à goutte, une radicalité qui m’a moi-même sauvé.
Je me suis rappelé que les poseurs posent et que pour les autres…
A chacun-e sa marche pour l’égalité
A chacun-e ses émeutes de 2005
A chacun-e son Exhibit B…
A chacun-e son réveil militant
❤️🖤💚
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English translation of the introduction
ERIF is launching its #blackvoicesmatter series with a guest post penned by Black French rapper and beatmaker Nicky Lars, writer and producer of the album Musica Negra.
In this self-reflective, poetic and politically engaged text, Nicky Lars offers us a moment to pause and look at the tide of thoughts and emotions flooding through his mind in this extraordinary moment, marked by the pandemic and a renewal of mobilization for Black lives. Moving between frustration, doubt and gratitude, the writing highlights the long and relentless struggle of Black activists in France, with a very special shout-out to Afrofeminists.
Check out Nicky’s latest work on his Bandcamp, Twitter, and Instagram.
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